Gérard Filoche, inspecteur du travail, est un ardent défenseur de la retraite à 60 ans, arguments à l’appui
Gérard Filoche est l’auteur de « Les nouveaux carnets d’un inspecteur du travail » (éd. Gawsewitch, paru le 9 avril) et de « Une vraie retraire à 60 ans c’est possible », avec Jean-Jacques Chavigné (éd. Gawsewitch, parution le 16 avril)
Pourquoi ferait-on travailler les gens plus vieux alors qu’on a 25% de jeunes au chômage ?
Pourquoi êtes-vous opposé à un départ à la retraite après 60 ans ?
Mais pourquoi ferait-on travailler les gens plus vieux alors qu’on a 25% de jeunes au chômage ? Les statistiques de l’Insee sont très précises : l’espérance de vie en bonne santé dans ce pays, c’est 63 ans pour les hommes et 64 ans pour les femmes. Pour les ouvriers, c’est 59 ans. A partir de 55 ans, deux maladies sur cinq sont liées au travail. A partir de 60 ans, c’est trois maladies sur cinq. Donc 60-65 ans ce sont les plus dures années au travail et ce sont les plus belles années de la retraite ! Si on mord là-dessus, on enlève quelque chose de fondamental aux gens. Certes l’espérance de vie s’allonge mais si elle s’allonge, c’est bien parce qu’on a la retraite à 60 ans ! Si vous faites travailler les gens au-delà, vous réduisez leur espérance de vie. Il faut retourner l’argument. Ce n’est pas pour rien que les assurances ont des tables de mortalité qui indiquent que, si vous travaillez jusqu’à 61 ans, vous avez six mois d’espérance de vie en mois. Et si vous travaillez jusqu’à 62, on vous retire encore un an.
Mais comment financer le système des retraites ?
On peut payer les retraites dans ce pays ! Il n’y a aucune problème de paiement parce qu’entre maintenant et 2050, même avec une très faible croissance, à 1 point, le Produit intérieur brut (PIB) va doubler mécaniquement. Après, tout dépend d’où cet argent sera affecté. Aujourd’hui 10 actifs ont en charge 4 retraités. S’ils en ont huit à charge dans 40 ans, où est le problème puisqu’à cette échéance, on aura deux fois plus d’argent au total ? Tous les calculs du Conseil de l’orientation des retraites se font à PIB constant. Jamais ils n’imaginent que le PIB augmente tout simplement parce qu’ils veulent s’accaparer les richesses et éviter qu’elles aillent dans les retraites !
Le « Travailler mieux, moins, tous » que vous défendez, c’est possible ?
Bien sûr. Un milliard d’heures sup – c’est ce que les Français font chaque année, dont une partie non payées – c’est l’équivalent de 600 000 emplois. Or, l’an dernier, on a mis 600 000 personnes en chômage partiel, contraint. Le travail est une comète en expansion infinie, il y en a pour tout le monde. Il suffit de mieux le répartir et d’encadrer les pratiques du patronat, avec le code du travail que le Medef et les politiques s’acharnent à détruire depuis six ans.
Dès que vous faites passer l’idée qu’il faut travailler plus, vous donnez l’impression qu’il n’y a pas de limites. Or l’histoire du salariat depuis 160 ans c’est justement de défendre l’idée suivante : « il y a des limites, arrêtez de nous exploiter »